En mars 2020, j’ai commencé une nouvelle série de dessins « Curls », toujours sur des formats de papier 50 x 65 cm., et toujours composés de boucles.
Pour cette nouvelle série, j’ai abordé l’expérience du dessin avec le souci constant d’être au cœur de la fabrique d’un réseau de boucles, compact, plein, recouvrant par nappes, soit noir sur noir, soit rouge sur rouge, soit noir sur rouge la surface totale du papier.
« Curls », dessins de boucles, me place dans le champs de l’action pure; penser les boucles les unes après les autres, les unes à côté des autres; se concentrer sur la lente progression que leur formation, soit au stylo, soit à la plume, requiert et oblige à tenir; se cantonner au geste circulaire que le tracé nécessite; croiser les boucles par couches, en laissant le dessous apparaitre... J’obtiens ainsi des sortes de nappes fluides et souples qui laissent apparaître le blanc du papier, qui frôlent parfois les bords du papier, qui se déploient de manière aléatoire mais contrôlées par ma main dont la seule nécessité est de tracer sans effet autre que permettre la juxtaposition des boucles.
Cela interroge sur la valeur du motif ( quel motif visuel et quel motif conceptuel ) et sur la motivation qui meut le dessinateur . Qu’est-ce qui pousse un individu à tracer de la sorte, obstinément, des boucles en enfilade, des boucles, simplement? Lorsque je fais ces dessins, je suis totalement immergée dans cette action; et c’est comme marcher : on a l’esprit libre, on peut se laisser guider par le geste, cela devient comme un soin, comme un soin à soi-même et comme un soin à ce que l’on dessine. Ce temps passé à dessiner est un temps plein, un temps total qui relie chaque élément jusque là séparés. La main, le corps, l’outil, le papier, la pensée, tous ces éléments forment alors une unité à travers laquelle le dessin peut se développer.
Août 2020